Né en 1942 en Prusse orientale, Gert Neumann a suivi des études de littérature à l’institut J. R. Becher de Leipzig, dont il fut exclu en 1969, en même temps que du parti, à la suite de prises de position poétiques et idéologiques contraires au dogme officiel. Dissident radical, inquiété par la STASI qui n’hésita pas à incarcérer son fils, il choisit la voie du silence, du retrait et de la clandestinité plutôt que de la rébellion ouverte qu’il considérait comme une forme de participation à la violence d’État. Il opta ainsi pour un mode de résistance qui consistait à devenir « impensable » pour le système d’aliénation, à s’y soustraire, plutôt que de lui fournir une caution réactive. Il travailla alors comme serrurier, ou comme conducteur de tracteur. Écrivain majeur, loué par Martin Walser, ses livres ne purent paraître qu’en Allemagne de l’Ouest : ses orientations esthétiques étaient trop éloignées des préceptes du « réalisme socialiste » et mettaient trop en question la réalité triviale de la RDA.

L’écriture de Neumann est difficile, sa syntaxe étonnante, ses phrases se ramifient indéfiniment et semblent vouloir en permanence contrarier l’architecture même du réel. L’ensemble de ses œuvres tourne autour de cette question centrale : comment peut-on parvenir à désaliéner la langue, à faire disparaître du langage tout marquage de la « dictature », à résister ainsi à l’oppression politique par et grâce à la langue elle-même ?

Gert Neumann vit actuellement à Berlin. Son œuvre est totalement inconnue en France. Lambert Barthélémy, qui en est le premier traducteur, a donné des extraits, dans Grèges et dans moriturus n° 5, d’un livre paru en 2009 aux éditions Léo Scheer - collection Lignes & Manifeste :